La sécurité en marge de l’organisation
La sécurité au travail est encore trop souvent vécue comme un système vivant en marge de l’organisation de l’entreprise. Dans ces conditions, ce monde parallèle peut-il amener de la performance ?
Bien sûr, vous allez me dire que c’est une caricature et que ce constat ne peut être fait que dans les sociétés n’ayant qu’une faible maturité sur les sujets de management HSE. C’est possible mais malheureusement ça existe encore…
Cela dépend beaucoup des convictions et de la volonté du dirigeant. Si ce dernier voit la sécurité comme un mal nécessaire, notamment vis-à-vis des contraintes réglementaires ou des risques juridiques, il y a fort à parier qu’il mettra en place une fonction HSE à qui il déléguera la prise en charge des aspects HSE, sans réel soutien. Dans ce contexte notre responsable HSE n’aura pas une mission facile malgré toute sa bonne volonté. Soit il se battra contre les moulins à vent pour faire avancer ses sujets, soit il mettra en place une usine à gaz pour se couvrir, voire les deux.
Cette vision de la sécurité comme étant un coût, et non un levier de valeur, ne peut pas générer de performance. Au mieux, ça reste une charge, au pire, c’est contreproductif. Si le système de management de la sécurité avec ses règles et dispositifs vit en marge de la vraie vie de l’entreprise, non seulement c’est vécu comme une contrainte par les opérationnels, mais en plus ça crée de la sous-performance par l’application de règles non pertinentes par rapport aux activités.
Bien évidemment on peut également retrouver ce biais dans les organisations n’accordant que très peu d’importance au management participatif (approche très prescriptive), où le travail prescrit cohabite peu avec le travail réel. Cette situation de marginalisation des aspects HSE peut aussi être observée dans les organisations où le management HSE n’est qu’une façade et seulement de beaux discours, mais la réalité est tout autre.
Pour être efficace et performant en matière de sécurité, vous l’aurez compris, la sécurité doit être complètement intégrée à l’organisation de l’entreprise, dans chaque processus, dans chaque fonction, dans chaque pratique.
Cela commence par changer les convictions et croyances des dirigeants. Ils doivent être convaincus que la sécurité est un levier de valeur, et l’intégrer dans la stratégie d’entreprise comme tout autre enjeu. Ce sujet doit être managé à leur niveau en l’intégrant dans les instances de gouvernance existantes, sans avoir besoin de créer des comités ad hoc. Les sujets HSE doivent être discutés lors des comités de direction, avec la participation de la personne en charge d’animer ces sujets. L’importance donnée aux sujets HSE doit être démontrée par la direction, par ses actions, ses décisions et arbitrages. Les pratiques de la ligne managériale sont à aligner sur le leadership sécurité de la direction. Chaque manager (y compris au niveau des services support) doit avoir compris son rôle contributif à la performance sécurité et plus globalement à la performance de l’entreprise.
Le système de management HSE n’est pas un mille-feuille venant en plus du système qualité, qui lui-même, est superposé au mode de fonctionnement opérationnel de l’entreprise. Il doit y avoir qu’un seul système de management, celui de l’entreprise, intégrant l’ensemble des aspects qu’ils soient HSE, qualité, productivité et autres.
Il est important ensuite d’impliquer tous les acteurs, sans imposer la sécurité par une approche descendante prescriptive, mais plutôt en créant l’adhésion par un management participatif. Quand les employés ont compris que c’est pour eux que ce sujet est développé dans l’entreprise, pour améliorer leurs conditions de travail, et plus globalement pour mieux travailler, et que la sécurité est à considérer par tous comme une responsabilité partagée, c’est presque gagné. Les managers doivent également connaître les problématiques rencontrées sur le terrain, y apporter des solutions, et veiller à ce que les règles restent pertinentes et adaptées permettant la bonne réalisation des activités.
Vous l’avez compris, l’intégration parfaite de la sécurité dans l’organisation est la clé de la performance. On commence à être bon en sécurité quand on ne parle plus de sécurité, quand celle-ci est complètement intégrée à la vie quotidienne de l’entreprise…